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Définitivement

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16 décembre 2013

Dans ce magasin, on y va franco. On met carrément

Dans ce magasin, on y va franco. On met carrément en place des sortes de messes noires auxquelles les clients participent. On leur fait crier "ah mais bien sûr qu'un livre n'est pas fait pour ressentir des picotements paradoxaux perturbatoires qui changent ta vision du monde ! ah mais bien sûr que c'est une marchandise à laquelle tu goûtes comme tu trempes ta grosse bouche dans de la mousse au chocolat ! ah mais bien sûr que ça doit contenter tes babines et rassurer ton besoin de coups de chiffon bien ordonnés ! ah mais bien sûr ! ah mais bien sûr ! ah mais bien sûr ! un livre n'est rien d'autre qu'une patrie, une nation ! tu t'y plais car tu l'as toujours connue comme ça et du coup t'en es gaga, ah mais voilà ! tout le reste n'est que perturbations, courts-circuits ostentatoires qui n'ont rien à faire là, folies innommables qui défilent sans charpente, sans logique arrangeante !".

Et ça tape sur des plots avec des frites de piscine, pour faire dans la stéréotypie bien saccadée, pour faire dans la méthode Coué : "ah mais bien sûr que oui, oui, oui, ah mais bien sûr que oui, voilà, c'est ça, c'est important pour toi de pouvoir faire jouer comme il faut la mécanique interne que l'on t'a construite, sans la faire sortir de ses gonds, en la huilant bien, en la lustrant tel un caniche, cette créature mutante entre l'animal et l'objet, entre le canin et la niche, la niche à laquelle tu rentres tous les soirs la queue entre les jambes pour kiffer sur les éjaculations des libéraux qui te gouvernent et des fachos qui te distraient, han oui quel pied ils prennent à aller au bout de leurs phrases, à dire 'responsabilité', à dire 'ambition', à dire 'peuple', à dire 'immigration', han oui ça se voit qu'ils aiment défoncer les concepts, pour taper toujours plus fort sur l'individu, pour le noyer dans leur ordre qui te berce", ah mais bien sûr que oui, tout le monde répète ça en choeur.

Et on peut dire que ça marche car les gens passent à la caisse avec des tonnes de merdes en papier qui ravissent leurs gueules enfarinées.

De leur côté, les vendeurs entonnent une mélopée dont le refrain est : "si j'ai menti pour le Marché, le Marché m'absoudra car il n'avance que comme ça ; si j'ai menti pour le Marché, c'est que j'ai tout compris de lui ; mentir pour le Marché, le seul mensonge qui soit autorisé ; mentir pour le Marché, le seul mensonge qui soit encouragé".

Et ça ne gêne pas les clients car ils le savaient déjà et ça ne leur fait ni chaud ni froid car au moins ça veut dire qu'ils auront toujours leur pâtée déposée au fond de leur gosier. De leur côté aussi, "il faut bien manger".

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30 novembre 2013

Si j'ai tant de mal avec la culture, en tout cas

Si j'ai tant de mal avec la culture, en tout cas dans ses formes les plus fréquentes, c'est parce que je hais qu'on s'exclame "comment c'est trop ça ! comment c'est trop vrai !". Il faudrait plutôt s'écrier "mais comment peut-il se permettre d'écrire ça ? comment en est-il sûr ? qu'est-ce qu'il lui prend d'asséner une phrase comme s'il était le roi ?".

Personnellement je ne recherche pas ce qui est vrai, ce qui est "ça", du coup ça me coupe de la plupart des pans de la plupart des arts. Pourquoi veut-on forcément tendre vers le vrai ? La vie et le monde c'est déjà du vrai alors ça suffit, arrêtons de vouloir en plus mettre du vrai dans l'art (qui n'est ni le monde ni la vie) ! Pourquoi si peu de gens aiment goûter aux plaisirs du faux, de l'absolument faux fou, alors qu'il n'y a que quand on est fou-faux qu'on est nous, qu'on est dépouillé de toute l'armure de vrai que l'on s'est créé ?

Par exemple, quand je ne me rends même pas compte que je chante et que je m'aperçois ensuite que j'ai une toute petite voix douce et gentille quand je chante comme ça spontanément, eh ben ça me fait pleurer de joie de me rendre compte que ce que je croyais être du vrai (mon intelligence brute, cérébrale et tortueuse) est en fait balayée par ce faux qui jaillit de ma bouche (ma douceur légère, insouciante et sensible). Si ça se trouve, c'est mon faux qui est vrai. Oui, c'est lui le vrai, c'est lui le beau. Donc comme c'est mon faux qui m'émeut et me plaît le plus et que mon faux est vrai, ça veut dire que moi aussi je suis attiré par le vrai. Donc je suis à peu près comme les autres. Ouf, merci.

28 novembre 2013

Les fachos pensent que le Bien passe par les

Les fachos pensent que le Bien passe par les coups de trique, les libéraux pensent que tout se vaut, quant à nous on ne sait pas trop quoi penser, bien qu'on sache qu'on soit les seuls à avoir raison (ce qui nous est d'ailleurs reproché ! mais pourquoi ? c'est l'inverse qui serait grave : savoir tout penser précisément sans être sûr d'avoir la raison avec soi, et d'ailleurs ça c'est ce que font les fachos et les libéraux). On sait juste que le bien existe, on préfère lui enlever sa majuscule pour bien montrer qu'il est naturel et on essaie de mettre des mots dessus : "naturel" mais aussi "commun" (on est forcément en connexion) ou "existentiel" (on est forcément seul face à l'infini), on n'est pas forcément d'accord mais on essaie, on sait qu'on essaie. C'est évident que quelque chose nous relie, mais à la fois c'est normal que chacun suive sa voix, oui sa voix car c'est important de s'écouter, comme on prétend pouvoir écouter l'être dans ce qui est vraiment lui, dans ce qu'il semble ressentir sans concessions depuis ses tout débuts. Se dépouiller, on tend forcément vers ça.

28 octobre 2013

"On sait bien que les gens sont portés sur les

"On sait bien que les gens sont portés sur les faits divers, les politiciens véreux, alors pourquoi ne pas être franc jusqu'au bout ?" s'est dit ce magasin culturel. Il a donc tout naturellement imprimé des sortes d'autocollants francs sur la tête de ses vendeurs, des sortes de pancartes en bois qu'on peut soulever pour voir leur gueule, si jamais on est foncièrement prêt à traiter avec lui malgré ce qu'on a lu de lui sur l'aire de franchise. (Il faut faire attention de pas rabattre trop violemment pour pas lui faire mal à sa gueule, du coup on va prendre de la matière carton au lieu de la matière bois.) 

Voici en quoi consistent ces aires : en gros il y a marqué la nature même de son être en tant que type qui choisit de travailler là et de mener cette activité, la nature même de cette activité par conséquent. On pourra donc lire sur la pancarte faciale franche de Ludovic : "Je sais bien que l'art c'est indicible et que c'est bien plus que ça, mais je manie quand même ses produits par douzaines avec mes mains dans des palettes, des cageots et des chariots pour en faire bouffer, car je dois bien bouffer moi aussi". Sur celle de Frédéric : "Je sais bien que tout ne se vaut pas mais je mets quand même tout sur le même plan, surtout ce qui est le plus nul car mathématiquement comme les gens sont surtout nuls ils vont surtout aimer ce qui est nul et ce qu'ils savent être le plus nul car ils l'ont déjà vu dans des endroits nuls". Sur celle de Yannick : "Je sais bien que ma mission serait d'éclairer mais je laisse ça aux néons violents au-dessus de moi car j'ai d'autres choses à faire, faut que je range des trucs et que j'indique où ils se trouvent".

Est-ce que ça a particulièrement attiré des gens ? Comme on s'y attendait : ni plus ni moins. Les gens savaient déjà tout ça.

21 octobre 2013

Il me dit : "Je n'aime pas qu'on me montre des

Il me dit : "Je n'aime pas qu'on me montre des images, qu'on les fasse défiler devant mes yeux, par contre quand tu les étires avec des mots, que tu essaies de comprendre les ingrédients de tel mouvement que tu dépèces, je saisis et j'adhère. Je me colle tout contre et je ressens des picotements. C'est peut-être parce que c'est moi qui fais le chemin pour les prendre en moi."

Sur ces paroles, je choisis de regarder ailleurs. Tout en surfant dessus (sur ses paroles, donc), je vois la personne au bout de la rue avec son pardessus et sa malette qui met un pied devant l'autre pour rejoindre son domicile. Il m'arrête tout de suite : "Tu vois, tu commets déjà des impairs : on croit que c'est la malette qui met un pied devant l'autre et tu surinterprètes en pensant que cette construction imposante, cette simple structure urbaine dont tu ignores les matériaux, est son domicile. Tu m'as perdu, j'ai enlevé mes mains de ta bouche, je ne possède plus rien."

Il m'agace un peu car je pense qu'il est autocentré. Qu'est-ce que ça peut lui faire si le bonhomme vient bel et bien d'entrer dans ce qui semble être l'immeuble dans lequel il est parfois tout nu sous la douche ? Bien sûr, il m'interrompt : "Tu veux dire que c'est moi qui vais prendre la douche chez lui ? Quand tu demandes qu'est-ce que ça peut lui faire tu parles bien de moi quand tu dis lui, donc quand tu dis qu'il est parfois tout nu tu penses aussi à moi en disant il, n'est-ce pas ? C'est comme ça que tu me vois ?".

Et il claque la porte de l'habitation donc oui, c'était bien la même personne, désolé. Je devais donc parler très fort et lui aussi, tant pis.

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14 octobre 2013

Il a placardé une pizza à demi mangée sur sa

Il a placardé une pizza à demi mangée sur sa porte. Il a placardé une pizza à demi mangée sur sa porte. Histoire de nous dire qu'ici on mange comme des porcs (car c'est une marque junk-food, pas du tout traditionnelle ou petit doigt en l'air). Histoire de nous prévenir qu'ici ce sera à la bonne franquette, qu'on commencera des plats sans les finir, qu'on goûtera à divers mets dans le désordre, tous bien dégueulasses comme il se doit, aucune finesse prévue. Ça va faire combien de temps que la pizza est là comme ça ? Ça va faire combien de temps ? 

La légende dit qu'au début elle était entière mais que c'est un voisin qui passait par là qui en a mangé un bout. À l'époque elle était encore mangeable (bien que dégueulasse comme il se doit), mais maintenant je crois qu'on peut dire qu'elle est plutôt périmée, étant donné la température du couloir de l'immeuble pendant l'été (dans lequel nous sommes). La légende dit que la date de péremption s'imprime en chiffres de feux sur sa surface et sur les yeux de ceux qui en sont illuminés comme des prophètes après une révélation ou un miracle. Car c'en est un, en quelque sorte. D'autres légendes disent qu'il n'en est rien, que l'odeur suffit pour savoir ce qu'il en est, pas besoin de chiffres de feux.

Comment est-elle placardée ? Est-elle scotchée ? Avec du scotch ? Apparemment elle avait été humidifiée sur le dessous et ça lui a suffi pour se fixer. Elle est comme ça.

Ils avaient pris une pâte garnie au fromage, du coup elle est épaisse. Il y avait un supplément quand on choisissait cette option. La boîte a fermé depuis. (Je parle de la firme. La boîte de la pizza a tout de suite été jetée dans une poubelle ou une corbeille, je ne sais plus.)

7 octobre 2013

Forum de l'emploi : 5 minutes pour convaincre.

Forum de l'emploi : 5 minutes pour convaincre. Envie de gerber.

Mais nous sommes déjà dans une nouvelle ère. "Se vendre" rapidement et efficacement comme à la télé, la télé souriante avec des dents qui brillent, c'est déjà presque de l'histoire ancienne. C'est limite ringard. C'est 90's. Nous sommes désormais dans la télé postmoderne, celle qui est laborieusement cruelle, pire que masochiste car on ne prend même plus plaisir à souffrir, ce n'est qu'un mal nécessaire en vue de notre "carrière". Nous devons faire beaucoup plus que nous "vendre" : nous devons nous "défendre". Le champ lexical s'est déplacé et a encore gagné en dimension militaire.

Le satiriste du monde de l'emploi devait jadis railler les annonces fleuries et hypocrites nous promettant monts et merveilles. C'était plus facile. Se moquer de l'hypocrisie, c'est vieux comme le monde. Désormais le monde a fait peau neuve et s'est décomplexé : tout est dit clairement. "Voici cet emploi de merde, vous allez en chier, c'est un poste nul et vomitif. Êtes-vous prêt à le subir ? En avez-vous vraiment la capacité ? Défendez-vous." Le masque est tombé mais ça n'en est que plus absurde. Le satiriste est décontenancé par l'absurde.

Quasiment tous les entretiens que j'ai vécus se sont résumés à ça : le patron déprécie le plus possible ce qu'il a à me proposer pour voir si je suis capable de l'avaler. "Capitalisme joyeux" ? Belle lurette qu'il ne l'est plus ! Il se sait déprimant et désespérant mais sait aussi que l'on ne peut vivre sans lui. 

"Alors vous devrez faire ça, êtes-vous conscient qu'il faudra faire ça, ici c'est vraiment pas terrible car on fait comme ça, ce sera pourri car vous ne pourrez faire que ça, ce sera très dur car il y aura ça, ce sera exigeant et éprouvant et dégoûtant. [...] Le poste vous intéresse quand même toujours ou pas ?" Ben non, tu crois quoi ? Envie de gerber ! Et c'est là qu'on a perdu. Il fallait garder le sourire délirant de l'aliéné. Le travail crée de la folie, il le sait bien. Mais il fera toujours avec, tant que la folie sera conciliante. Quand ne le sera t-elle plus ? Peut-être bientôt, qui sait.

8 septembre 2013

À ceux qui ont raté ça, je me permets d'évoquer

À ceux qui ont raté ça, je me permets d'évoquer l'un des plus incroyables feuilletons-révélations de l'été : on a appris que le fin du fin de la Justice, le but ultime à atteindre, c'était de ne surtout pas être « laxiste ». On se demandait depuis longtemps à quoi servaient les prisons, on avait bien émis quelques hypothèses : protéger la société de désordres humains imprévisibles, de dangers concrets imminents, ça on pouvait le comprendre, mais par contre on ne voyait pas pourquoi elles faisaient le maximum pour que les actes qu'elles combattent aient toutes les chances de se reproduire à la sortie de leurs entrailles. On a enfin saisi : leur seule aspiration doit être de ne pas être « laxiste », leur raison d'être est donc basée sur une injonction purement négative. Combattre le mal par le mal. Un pauvre vole, vengeance, nous le volons à notre tour. Ah tiens, comme par hasard, il en ressort encore plus pauvre et il vole de nouveau ! Comme c'est curieux ! Mais qu'à cela ne tienne, c'est reparti pour un tour à la zonzon : l'essentiel est de ne pas être « laxiste ». En toute logique, le retour de la phrase « Oeil pour œil, dent pour dent » dans les textes de lois aurait donc été réclamé par certains élus, comme on me le souffle dans l'oreillette. La philosophie de notre civilisation avance énormément, chers amis.

5 septembre 2013

Dire « Il faut que ça parle à tous, que ça

Dire « Il faut que ça parle à tous, que ça corresponde à ce que demandent les gens, à leur vécu » serait donc toujours égal à « Superficialité futile » et « Empilement de clichés construits de toutes pièces par de tierces personnes » ? Pourtant, si on répond ça, on fait du sophisme.

Au contraire, s'il y a bien quelque chose qui est commun à « tous », qui « correspond » à la vie intérieure de chacun quelque soit son identité, c'est justement l'indicible existentiel, le souffle que l'on ressent concernant les bribes diffuses de perceptions paradoxales dans ta tête et sur ta peau.

Les trucs que t'aimes parce que le monde te les a montrés ou te dit de les faire, genre ta lessive à tel degré plutôt qu'à tel autre ou cette façon de gérer une intrigue à rebondissements, ce n'est jamais ce qui te « correspond » le plus, tu peux avoir une petite accointance mais ça ne creuse pas très profond, c'est des mecs avec des costards et des chemises qui te l'ont fait croire. Ce n'est pas dans ça que tu vis vraiment, c'est dans tout autre chose : c'est dans les bribes et les paradoxes. Il faudrait juste un déclic pour que tu t'en rendes compte. Allez, ça peut bien advenir un jour, bordel !

2 septembre 2013

Bon, on le sait, « travailler » = « devoir

Bon, on le sait, « travailler » = « devoir s'intéresser à quelque chose dont on n'a rien à foutre ». Plus personne ne cherche à remettre ça en cause. On grandit encore avec l'idée que notre « travail » doit correspondre à nos « centres d'intérêt », sauf qu'on veut justement qu'il n'y en ait plus qu'un seul (de « centre ») pour qu'il prenne bel et bien le centre de notre vie (au sens propre car quantitatif du terme : la majeure partie de nos heures d'existence).

 

Et pourtant, on sait bien que le trop-plein cause le dégoût : lire toute la journée ton écrivain préféré finira par te le faire sortir par les yeux. Certes, « l'appétit vient en mangeant », mais pas en se gavant jusqu'à plus faim. Le « travail », c'est 35h de chocolat ou de Beckett par semaine, ce qui au final revient à la même chose : c'est déjà trop. C'est toujours trop.

 

Qui s'en saisira un jour à bras le corps ? C'est pas demain la veille, il faut encore penser à « l'emploi ». « Le travail » ce sera pour après-demain, quand on aura réglé « l'emploi ». Mais c'est long. C'est toujours trop long quand on est fatigué.  

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