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29 août 2020

La véritéOù se situe sa vérité, et plus

La vérité

Où se situe sa vérité, et plus globalement la vérité du truc (de la mort) ? 
Deux exemples : il partait dans un grand rire quand il disait "peut-être que je ne serai plus là d'ici là" et le dernier jour où j'ai pu l'entendre parler il a ri de l'ironie de la situation suivante : recevoir enfin l'annonce de la venue à domicile de tel intervenant paramédical qu'il attendait depuis des mois alors qu'il n'était désormais plus près d'y revenir et qu'il était même en train de partir pour de bon (partir de tout) ; énorme rire, ce coup-ci. Pas perçu de façon cynique, toujours frais et sincère, s'apercevant spontanément de l'absurdité spontanée, immédiatement perçue comme simplement ironique, de la situation. Était-ce la vérité ?
Car quelques jours plus tôt : se prend à un moment la tête entre les mains quand il réalise que c'est fini. Réalisation qu'il verbalisait pourtant depuis longtemps (mais alors comme en conjurant ?) et paraissant comme beaucoup plus théâtralisée que son rire car se montrant en cette occurrence-ci devant une professionnelle, tandis que le rire était réservé à la famille.
Je crois que ce n'est pas manquer de respect envers sa mort que de penser que la vérité, sa vérité s'est située dans son rire. C'était vraiment lui. Non pas rire de désespoir (car quel désespoir quand toutes les données de base sont déviantes ?), ni rire sarcastique et cruel d'automépris mais même rire que d'habitude comme après ses calembours : drôle de situation quand on la regarde, c'est tout.
"On", était-ce vraiment lui au plus profond, est-ce que l'on... Fausse question. Pourquoi serait-on "je" avant d'être "on" ? On est toujours "on", c'est même ça qui nous sauve de "je" : un beau jour, on a eu envie de créer ça, de créer "on".
On a appelé ça la vérité. 

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24 août 2020

Le monde légitimé envers ma fille, 2040 (3)

Le monde légitimé envers ma fille, 2040 (3)

 

Dialogue entre Nicolin et Mélentille, réciproquement curieux l'un de l'autre.

M. : Ça fait comment, se déprendre ? Ça fait délier, comme il a dit mon papa ?
N. : Euh, j'c... j'connais pas moi tous ces mots, tout c'que j'peux dire c'est... c'est qu'j'ai compris pourquoi ça collait pas, et qu'maintenant ça colle un peu mieux, c'tout. Mais sans rancune envers les autres, hein.
M. : C'était quoi par exemple, de pas coller ?
N. : Ben tu vois... j'me... enfin j'me... disons qu'j'répondais aux gens qui m'demandaient d'décrire l'truc qu'j'avais du "stress", c'comme ça qu'les magazines de ma grand-mère ils disaient, alors que j'me sentais tout le contraire d'un stressé. Du coup ça dissociait un max dans ma tête : stressé ou pas stressé ? J'l'étais à la fois toujours et jamais. Maintenant qu'on a trouvé quel aliment pris à telles heures faisait rendre mon "corps" comme du "stress" et d'la "tristesse", comme ils disaient, ben faut tout que j're-dissocie mais différemment.
M. : Mais du coup ça fait pas perdre de vue ce qui peut venir de ta tête, le fait de ne se pencher que sur l'extérieur genre la bouffe ? 
N. : Hé ma p'tite, moi, "l'extérieur" et "ma tête" j'sais pas c'que c'est ! Donner l'pouvoir à la psychologie c'est le pire cadeau qu'on n'a jamais fait aux bourreaux de nos corps (j'te parle de l'humanité, là). On s'arrêtait pas d'dire qu'il fallait faire le lien mais on le faisait jamais. Les liens qui s'faisaient c'était pas des liens, au contraire, c'était juste d'dire "l'un fait sur l'autre", "l'autre relève de l'un", mais c'est pas ça un lien, putain !
(un temps)
M. : Oh c'est bon, t'énerve pas... t'as pas vu l'âge de mes oreilles ?
N. : Pardon... Mais enfin maintenant qu'j'ai compris l'truc, j'comprends pas comment on peut pas l'comprendre (j'crois que c'est c'qu'ils appellent "la rançon du succès", dans ces putains de... enfin j'veux dire, dans ces magazines). Le lien, ça dynamite carrément les entités d'la causalité – c'est comme ça qu'j'les ai appelées, t'as vu moi aussi j'peux parler quand j'veux !
M. : Mmh...
N. : Attends mais tu t'rends compte ? On définissait des termes séparés ! DES TERMES SÉPARÉS ! T'imagines l'âge de pierre ? Tu l'imagines ?
M. : Ben je suis quasiment née dedans, mais si j'en crois papa c'est en train d'changer...
N. : ...Et si t'en crois moi ! Car tu peux m'croire, ouais ça c'est l'invention qui va changer !
M. : Changer quoi ? Tout ?
N. : Tout dépend c'qu'on met dans ce tout. On est arrivés à un point où c'est déjà en partie trop tard, regarde-moi (par exemple, hein ; j'suis là alors j'vais m'prendre comme exemple, hein, rien d'plus) : j'me dis que c'est par ma douleur infinie que j'suis l'plus chanceux, car c'est ça qui m'a poussé à venir ici et à comprendre le truc des liens qu'on faisait pas ; j'pourrai peut-être pas changer ma douleur, mais je pourrai savoir d'où elle vient et d'où elle ne vient pas. Des fois on en parlera (il y a des moments pour ça, t'sais, et faudra continuer), et des fois on parlera d'autre chose. Mais en tout cas ce s'ra toujours là en moi. Cette compréhension.
M. : Que quoi ?
N. : Qu'on n'est ni des corps à gaver ni des cerveaux à mener ! Qu'on est à l'entrecroisement de tout c'qu'on peut bien dire de nous. Ou à l'intersection, si tu préfères.
M. : C'est pas un peu la même chose ?
N. : Pour une fois oui, c'est la même chose. Mais ça arrive pas souvent. En tout cas pas aussi souvent qu'on voulait nous l'faire croire.

 

14 août 2020

Le monde légitimé envers ma fille, 2040 (2) Je

Le monde légitimé envers ma fille, 2040 (2)

 

Je l'emmène voir comment l'on traite désormais. Ça se passe là où il y a du matériel.

« Tu vois ces graphiques avec des points ?

– Euh... C'est comme d'habitude, non ? Y'a toujours des points, des lignes et des bidules qu'on encercle pour pouvoir dire de quoi ils font partie, mmh ?

– En partie seulement, en partie ! L'essentiel est qu'ils ne s'appliquent pas aux mêmes données, ou plutôt que l'on relie et par là même relit celles-ci d'une toute autre façon. Ça nous fait encore plus apparaître à quel point on était ridicules d'être tout fiers de nos modèles, des relations que l'on établissait alors que l'on n'était même pas sûrs d'avoir identifié les bons termes à mettre en relation ! Quand j'y repense, j'ai envie de partir dans un grand rire, tu veux bien partir dans un grand rire avec moi ? Je t'y emmène...

– (pas l'air partante) Pour l'instant c'est ici que tu m'as emmené et je veux que tu m'y montres la raison pour laquelle ! (surjoue exprès la détermination à me faire cesser ma jovialité dissipée, à la dissiper justement)

– Bon, très bien. Alors je te présente Nicolin. Tu vois, Nicolin vient ici régulièrement, quasiment tous les jours s'il le souhaite, pour apprendre qui il est grâce à nos outils et aux siens (les nôtres n'étant rien sans les siens et vice-versa). 

– Apprendre ? On apprend encore ? Ça dicte encore ce que...? (j'étais sûr qu'elle le relèverait)

– Ou disons qu'on détermine, si tu préfères ! rétorqué-je. 

– Détermine ? C'est encore pire !!! (prend un air affolé)

– Roh, tu vois bien que tous les mots sont minés ! Or, il faut bien que l'on dise des trucs sur des trucs. On dit, c'est tout. On pense quelque chose dessus, alors on dit. Rien de plus, ne va pas t'en faire une idée régressive. Je sais bien que l'assurance, c'est la chose inatteignable pour nous autres (ceux qui avons décidé de survivre jusqu'ici en ne suivant pas ce que l'on entendait le plus souvent). L'image que l'on pouvait en avoir était même faussée jusqu'au trognon, puisque par définition, tous les gens qui disaient étaient ceux qui savaient, bref ceux qui ne se sentaient plus. On n'avait alors qu'à se dire que si on se sentait encore un peu, mieux valait ne rien dire puisque c'était semble t-il ce que faisaient tous ceux qui nous ressemblaient. Alors on laissait la parole aux autres, qui utilisaient des expressions comme "point barre" et "connard". Pour notre part, nous ne les avons jamais dites sauf pour mimer en nous moquant les férus de constatations.

– Mais alors ça dit quoi maintenant ?

– Ça dit... Ça dit ça, par exemple, regarde (je lui montre l'historique de Nicolin tel qu'actuellement consultable à ses côtés) : ça essaie de savoir pourquoi Nicolin a parfois tels états d'âme qui l'ont toujours empêché de dire. Tu vois qu'on est bien obligés de dire, parfois, quand il faut savoir pourquoi ça dit pas ! Comme tu peux le voir, d'après les récits grandeur nature qu'il nous en avait fait – toute reconstitution de période, qu'elle soit moment récent ou de jeunesse, prenant un temps le plus strictement semblable possible à la durée temporelle qu'elle se propose de traiter – , à chaque fois qu'il ne tenait plus spécialement à la vie, cela coïncidait avec l'ingestion de tel type d'aliment. Ce lien, on l'a trouvé ensemble, parce qu'on y a mis les moyens. Il fallait en passer par là pour aboutir. L'aboutissement, c'est que maintenant, il est en train de travailler sur le fait d'éviter de relier ces déprises à une quelconque vision ou jugement des choses ; il délie. Car oui, c'est bien souvent le principal acquis des nouvelles liaisons qui viennent se faire jour ici : elles coupent toutes celles qui encombrent, enferment. 

– Mais ça fait pas trop perdre la rage contre le monde ? (elle vient, durant le cours de ce dialogue, d'entrer ce que l'on appelle l'âge de bon sens, situé entre la crise d'insouciance et la crise de "connaissance")

– Au contraire, bien au contraire ! C'est tout l'inverse ! Venir chercher ici (il n'y a pas d'autre mot pour décrire nos séances) lui permet d'entrer plus que jamais en révolte contre tout ce et tous ceux qui l'ont empêché pendant tant d'années de ne pas trouver. Et crois-moi qu'il en a pas fini ! 

– ...Mais t'sais, j'ai davantage envie d'les appeler que d'les jeter. Mais pour qu'ils viennent ici aussi, du coup. » (intervient enfin Nicolin)

C'est tous ce qu'on espère bien.


11 août 2020

Le monde légitimé envers ma fille, 2040 (1) « Ah

Le monde légitimé envers ma fille, 2040 (1)

 

« Ah mais tout l'inverse ! C'est tout l'inverse !

– Tu m'excuseras mais je me suis endormie d'un long sommeil et je ne me réveille que maintenant, dit-elle doucement (n'y voyez aucune référence, c'est bien ce qui nous est arrivé).

– Moi aussi, Mélentille, moi aussi, mais j'ai eu le temps, pendant que tu te débarbouillais, d'aller comprendre comment tout cela fonctionnait désormais. Et figure-toi, je te le redis, que c'est tout l'inverse !

– Par rapport à quoi ?

– Par rapport à tout, ou à peu près, ou disons concernant comment il faut se pencher sur les gens, ce qui est déjà pas mal. Tu vois, avant, on savait pas vraiment qui c'était les gens, sauf quand il fallait leur dire quoi être (là on savait toujours). Maintenant, c'est le contraire : on a décidé que les jugements, il fallait vite expédier ça, et pas seulement “comparaître immédiatement”, non, carrément n'en pas faire un plat ; rien de mieux qu'oublier quand quelqu'un a mal fait : s'y appesantir reviendrait à dire qu'on est fasciné par son mal, voilà ce qu'on s'est dit. Donc vraiment, les grandes robes qui n'en finissent pas, qui déclamaient à n'en plus finir non plus, leurs barreaux et tout le toutim-tintouin, on a détruit. C'est cassé. 

– Mmmh... (pensive) Mais pourtant on voyait que certains y prenaient plaisir, à mettre des mots sur tout, à... à essayer de cerner les types devant eux. Personne peut plus cerner quoi que ce soit, maintenant ?

– Ah mais bien au contraire ! C'est tout l'contraire ! Maintenant, on cerne tout. Tout sauf ça, tout sauf le mal. On cerne le type pour pouvoir lui apporter ce qui lui conviendrait. Exemple : il se trouve qu'un type, un jour, possède à la fois un corps, un cerveau, une histoire et des intérêts. Eh ben désormais, toute l'armada des grandes robes se réunit en transdisciplinarité pour se pencher sur lui !

– Sur lui ? Tu veux dire sur... sur son cas ? Cela reste un cas, hein ? (aime bien chercher la p'tite bête)

– Cela reste un soin, oui, si tu veux ! On s'est dit que c'était finalement pas dégueulasse, de soigner. “Va te faire soigner”, bah oui, avec plaisir, et toi aussi t'en aurais bien besoin, qu'il faudrait répondre ! Tout le monde, faudrait. Faudrait tout le monde. Et des deux côtés, tu vois. Là, les robes, elles s'efforcent de saisir ce que le type a besoin pour que ça puisse lui convenir, pour... pour que sa vie lui convienne. Non pas qu'elles sauraient à sa place qui il est, mais par contre ce qu'elles savent c'est ce à qui, à quoi il peut prétendre, vu qu'elles seules – vu qu'elles sont plusieurs et pas lui – le regardent de là où elles sont. Lui il cherche leur regard et elles c'est aussi le cas de leur côté, quand c'est leur tour. Bref, on commence à se connaître. On a droit à ça. C'est inscrit dedans.

– Ah parce que vous l'avez laissé ? (le droit)

– Boarf, y'avait encore du papier, fallait bien qu'il serve... C'était histoire de marquer le coup. Mais maintenant, promis, l'essentiel c'est pas lui, c'est nous ! »

 

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