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11 juin 2016

Si l'on devait aujourd'hui me demander la chose

Si l'on devait aujourd'hui me demander la chose dont je suis le plus fier en tant que Lucas Taïeb, ce qu'il faut retenir de moi, ce qui représente mon « fil rouge », comme on dit, c'est la création du concept de loin dans le près, théorisé en 2003 ou 2004 (les historiens divergent) et qui réussit à être décliné dans tous les domaines pratiques et théoriques qui me sont chers.

Le loin dans le près, c'était quand la fille que tu convoitais était assise dans la même salle de classe que toi, mais placée tellement loin que l'impossibilité qu'il y avait à projeter une prise de connaissance réelle ou d'entamer une discussion te sautait cruellement au cœur.

Le loin était bien moins pire, par exemple quand tu pensais à elle le week-end tout seul chez ta grand-mère, car au moins c'était clair qu'il fallait rien espérer. C'était fixe. Le loin dans le près empêche le confort intellectuel de la fixité car il est toujours mouvement vers la contemplation déceptive (« qu'elle est si jolie mais qu'elle est si loin »).

Le près, c'était par exemple avant d'entrer en classe, que tu pouvais essayer de lui adresser la parole ou en tout cas d'en rêver. Le loin dans le près n'est jamais un doux songe : il est trop concrètement obnubilant.

Le loin et le près fonctionnent aussi en mode obsessionnel (on parle bien d'amour non-réciproque de puceau attardé) mais tout leur est potentiellement possible. Le loin crée un monde d'émancipation poétique, le près sent que l'être et la peau peuvent ne faire qu'un. Le loin dans le près sonne le glas de toute forme d'espoir, de manière persistante, par aller-retour entre les deux points ; les yeux vont et reviennent sans cesse sur la créature inaccessible, se rappellent la distance affective effective. 

Le loin dans le près, c'est une clé anthropologique, sociologique, politique. Je l'ai vue se confirmer dans toutes sortes d'interactions, frictions, frottements : couple, classes, urbain-périurbain-campagne, échelle institutionnelle... Elle peut tout décrire, tout mesurer. C'est la théorie définitive de la frustration.

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