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Définitivement
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3 juillet 2015

Ma grand-mère semble se sentir toute petite face

Ma grand-mère semble se sentir toute petite face aux livres : elle les soupèse, les ouvre au hasard et dit souvent (ou en tout cas c'est comme ça que je peux le retranscrire car ce n'est pas ça dans le texte) : "oh, ça c'est quelque chose, il y en a là-dedans, ça va être dur de se mettre tout ça dans la tête, après ça je vais me sentir nourrie", l'autre jour elle a même dit "après avoir lu ça je serai immortelle". Pour elle, les écrivains sont des "philosophes", elle emploie souvent le mot "philosophe" pour dire écrivain, pour elle Kafka est un "philosophe" par exemple, ce qui n'est pas tout à fait faux.

Je me dis parfois que cette intimidation s'est perpétuée et peut expliquer ce que je vous répète à longueur de temps (que les livres, les livres d'écriture, n'existaient pas pour moi jusqu'à il y a peu). Mais je crois plutôt qu'il s'agissait d'orgueil : je pensais que ce qui était dans les livres, je l'avais déjà écrit, je l'avais déjà pensé, alors à quoi cela me servirait-il ? Ce que j'avais écrit, ce n'était bien sûr pas les mots mais la pensée qu'ils faisaient transparaître – on retrouve là l'obsession du "philosophe". Depuis, j'ai découvert que même si je l'avais écrit, des tintements de langage me manquaient pour le dire vraiment, non pas pour l'exprimer (je ne me suis pas senti empêché d'exprimer, d'exprimer encore et d'exprimer sans cesse) mais pour le faire s'articuler en sortant enfin du rond-point.

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